Correspondence

LETTRE DE RAMEAU AU PÈRE MARTINI - 6 juillet 1759

LETTRE DE RAMEAU AU PÈRE MARTINI

6 juillet 1759

Mon très révérend père,

En témoignant à Mr Beccari la profonde reconnaissance que m’ont inspirée les sentiments d’estime dont Votre illustre Société veut bien m’honorer, je lui ai donné en même temps à connaître combien j’étais ravi d’apprendre que vous fussiez chargé du soin d’examiner mon ouvrage. C’est à ceux qui ne veulent qu’en imposer, de craindre les censeurs éclairés : pour moi qui ne cherche que la vérité, mon révérend père, si j’ai lieu de me plaindre, ce n’est que sur le petit nombre de juges que nous offrent, en fait de connaissances musicales, même les plus savantes académies. Les traités, les systèmes sur l’harmonie n’ont été multipliés sans fruit et sans succès que parce qu’on n’avait point encore envisagé le phénomène du Corps Sonore : c’est de ce phénomène même que j’ai vu sortir les réflexions que j’ai l’honneur de soumettre au jugement de l’institut : je l’attends, ce jugement, avec la plus grande impatience ; quel qu’il puisse être, il me sera infiniment précieux. Si je ne mérite point votre approbation, vous me rendrez du moins le service inestimable de me faire connaître mes erreurs.

Je suis avec l’estime la plus profonde et la considération la plus respectueuse Mon très révérend père.

À Paris ce 6 juillet 1759

Rue des Bons-Enfants.

Toutes les lettres de Bologne en France sont arrêtées à Genève et la seule que j’en ai reçue de Mr Beccari ne m’a été rendue à peu près qu’un mois après sa date. On pourrait vous dire à la poste un moyen certain pour que vos lettres nous soient rendues.